Rapportée de Cologne, la cathédrale sous sa neige de plastique
La semaine dernière, je vous racontais comment j’ai découvert les charmes de l’Allemagne non-berlinoise en me rendant à Hambourg. Cette semaine, Génération Berlin vous parle de Cologne, cité laide, mais revigorante comme une eau de vie bien fraîche, dont les habitants sont tous plus délicieux les uns que les autres
J’étais en tournage à Cologne récemment. C’est avec une certaine excitation que j’allais découvrir la ville dont proviennent les Allemands les plus sympas que je connaisse. J’avais la tête déjà pleine d’histoires sur Cologne – les uns m’avaient parlé de telle école franco-allemande où ils avaient fait leurs classes, les autres de telle rue devenue pour eux buissonnière.
Au premier abord, Cologne est sacrément vilaine. Bombardements oblige. La ville est une collection d’immeubles sixties, période architecturale réputée pour son goût douteux et son fonctionnalisme désagréable. Dans les bars, les restaurants, les boutiques, les grands Allemands m’apparaissent comme autant de Gullivers déambulant dans des maisons de poupées, tant les pièces sont basses de plafond.
C’est ce qui accentue encore le contraste avec l’immense Cathédrale de Cologne. Cet incroyable vaisseau de pierre gothique fut, jusqu’à la fin du XIXe siècle, le plus haut bâtiment au monde. Tout ça sans grue ni bulldozers – l’Empire State Building peut aller se coucher. Véritable trésor architectural, cette cathédrale de 157 mètres de haut recèle des surprises artistiques à chaque pilier, à chaque vitrail. Plantée au beau milieu de la ville comme un monstre sublime, elle écrase toute la ville de sa splendeur presque noire – un bon petit coup de karcher ne serait pas de trop.
Outre ces considérations historiques, il fallait bien que je découvrisse la ville comme il se doit : en y faisant la teuf, grave. C’est mon amie Kitty qui s’en est chargée. Et plutôt bien, voyez. Cette haute, blonde et charmante demoiselle, mi-anglaise mi-allemande, est une très jeune et intello party-girl de Cologne. Rencontrée à Berlin lors de pérégrinations nocturnes, j’avais pu mesurer son potentiel de fêtarde : pire que le mien. C’est dire. Pour elle, l’eau de vie, c’est de la flotte.
C’est d’abord au Salon Schmitz, un bar digne d’un film de James Bond, que Kitty me fait descendre des verres de Riesling, qu’elle additionne à ma grande surprise d’un trait de rhubarbe. Lys géants sur le comptoir, lampadaires seventies, brique sur les murs, le Salon Schmitz est un peu chic, un peu trash, mais ne ressemble à rien de ce que l’on voit à Berlin. Je me retrouve en pleine Guerre froide, avec ma Kitty en espionne british aux yeux couleur schnaps.
Distributeur de bas au resto-bar Hallmackenreuther
Les sixties règnent décidément sur cette ville. Au resto-bar Hallmackenreuther, dans le quartier branché dit « quartier belge », parce qu’il se concentre autour de la Brüsseler Platz, on peut encore admirer le distributeur de bas qui venait en aide aux élégantes aux jambes filées. La cuisine, à déguster dans des fauteuils rétro, y est admirable – et le service tout autant. La légendaire amabilité colonaise est bien réelle.
Cathédrale, bars, restos : tout cela, c’est bien beau, mais Kitty n’avait pas encore sorti sa carte maîtresse. C’est lorsque je me retrouve à danser au beau milieu d’un superbe magasin de mode masculine élégamment appelé Monsieur Courbet, que je comprends à quel genre de ville j’ai affaire. Soit une ville fun, surprenante et peu conventionnelle.
Oliver, le patron de Monsieur Courbet, est un véritable charmeur colonais comme je les adore. Un peu Belmondo, un peu Steve McQueen, ce fou de mode et d’élégance sixties (encore une fois) m’ouvrit sa porte toute grande en me nommant « Madame l’accent ». Il s’empressa de faire de nous un portrait au feutre, nous vêtit de chapeaux d’homme et de vestes de velours bleu, et nous dansâmes, bûmes, rîmes dans ce décor improbable de vestons et de disques vinyles.
Ah, le charme des Colonais. Vous savez quoi? Tous les Allemands pour lesquels j’ai craqué sont, à l’origine, des Colonais. Rieurs, séducteurs, mais pas lourds : le parfait mélange entre le charme à la française et la pudeur à l’allemande. Ce qui m’amène au sujet de mon prochain article, soit l’amour version CECA*. Je vous avais déjà raconté les délires de la drague en Allemagne, il faut bien que je vous raconte comment ça se passe après…
Encore une petite eau de vie? Ja bitte. Mais à Cologne s’il vous plaît.
* Pour tous ceux qui me lisent qui ont passé leur bac il y a belle lurette et qui ont oublié comme tout le monde ce qu’est la CECA : il s’agit de la Communauté européenne du charbon et de l’acier fondée en 1952 pour empêcher une nouvelle guerre entre la France et l’Allemagne.
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