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Des résistants iraniens luttent à Berlin

Résistantes iraniennes blessées après une attaque violente au camp d’Ashraf, Irak, 2009 (source de l’image ici)

À Berlin, des exilés politiques iraniens organisent la résistance et luttent pour les droits de l’Homme en Iran au sein de leur association, la « Verein für Hoffnung der Zukunft e.V. » (Association pour l’espoir de l’avenir). Leur combat : que les 3400 réfugiés politiques du camp Ashraf (Irak), qui ont osé s’opposer au régime islamique, reçoivent de toute urgence la protection des organisations internationales.

Été 1988 : la République Islamique d’Iran exécute 30 000 prisonniers politiques, presque tous par pendaison. La plupart sont des Moudjahidines du peuple. Ce mouvement de résistance armée (OMPI, Organisation des Moudjahidines du Peuple Iranien), s’est formé en 1965 en opposition au régime du chah mais demeura actif après la Révolution islamique de 1979. Promoteurs d’un islam libéral, ils subissent les persécutions du régime actuel en Iran depuis plus de trente ans.

Aujourd’hui, ces hommes et femmes qui luttèrent pour la liberté d’expression ou encore contre la lapidation des femmes dites « adultères », se sont réfugiés dans le camp Ashraf, à 60 km au nord de Bagdad, en Irak.

Début 2009, le contrôle de cette cité est passé des mains américaines aux autorités irakiennes. Depuis, les forces irakiennes, sur les ordres du régime iranien, ont multiplié les attaques et les meurtres à l’encontre de la population d’Ashraf. Un siège inhumain, imposé par le Premier Ministre de l’Irak Nouri-al-Maliki, empêche les malades et blessés de recevoir des soins. Les observateurs internationaux ne peuvent pas se rendre au camp et les avocats des opposants ont le plus grand mal à pénétrer dans la ville.

A Berlin, un grand bâtiment en verre abrite les bureaux de la « Verein für Hoffnung der Zukunft e.V. » Ses membres, des hommes et des femmes exilés souvent depuis vingt ans en Europe, luttent à distance pour soutenir les dissidents d’Ashraf. Ils organisent des conférences juridiques dans toute l’Allemagne, des conférences de presse et des manifestations en signe de solidarité avec la résistance iranienne. Ils lèvent des fonds pour organiser des campagnes de sensibilisation afin que les organisations internationales, en particulier l’ONU, intercèdent en faveur des prisonniers politiques d’Ashraf.

Ils sont courageux, mais ils ont peur. Je ne prendrai pas de photos, je ne dirai pas leurs noms. Ils se cachent derrière le titre de l’association. Les représailles sont terribles pour ceux qui osent se battre, même depuis l’étranger. Car tous ces résistants ont encore de la famille en Iran : et c’est une mère, une sœur ou un petit cousin qui paieront de leur vie le combat de leur parent exilé en Europe.

L’association lutte également pour que les dissidents menacés de mort en Iran puissent accéder à l’asile politique en Europe. Elle travaille en commun avec des associations humanitaires, essayant de faire parvenir des médicaments aux prisonniers politiques.

L’association se bat furieusement pour les droits des femmes, qui, comme on le sait, sont bafoués chaque minute dans ce pays, où des hommes lapident en public et avec des cris de jouissance, celles qui ont le malheur d’avoir été regardées par un autre homme en dépit d’un voile qui recouvrent leur corps (mais aussi leur âme) de la tête aux pieds.

Ahmad*, un avocat, membre bénévole de l’association, m’offre un thé bien noir et de délicieuses douceurs persanes. Il est fier de la beauté de sa culture. Il s’enorgueillit de voir que j’apprécie la qualité de la gastronomie iranienne. Mais il est concentré, droit et sombre, lorsqu’il me montre les vidéos prises à Ashraf et me raconte l’état dramatique de plusieurs malades du camp atteints du cancer et privés de soin.

Ahmad m’a chargé de raconter leur lutte, car « il n’y aura jamais assez de presse à ce sujet », dit-il. Ceux qui souhaitent soutenir l’association par un don peuvent le faire à travers leur site Internet, www.vhdz.de.

Le réalisateur Jafar Panahi à Berlin en 2006

A l’heure où tout Berlin, échauffé, prépare son grand festival du cinéma, les organisateurs de la Berlinale ont eu le courage et l’intelligence de se montrer solidaires avec les résistants d’Iran. Le 11 février 2011, le film Offside du réalisateur Jafar Panahi (condamné par Téhéran à une lourde peine de prison) sera montré en grande pompe sur les écrans de la compétition officielle.

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manon

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bonnot
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L'ENFANT DU BLÉ - Raphael Djavani

ART SUD - Numéro 53
2ème Trimestre 2006

C’est de Paris où il vit en exil, que l’auteur adresse à sa famille et plus particulièrement à ses parents disparus, ce témoignage poignant. L’enfance de cet homme fut sacrifiée par un père, qui n’eut de cesse de maudire et de malmener les siens au nom d’un Dieu dont son ignorance lui avait fait détourner le message, au point de devenir esclave de sa foi. C’est pour cette raison entre autres, qu’a dix-neuf ans, l’auteur rejoint les moudjahidin du peuple de Massoud Radjavi. Il luttera contre les mollahs de Khomeiny, le guide de la révolution islamique qui va instaurer en Iran une dictature impitoyable, qui fera un nombre important de morts, notamment au sein de la jeunesse Irannienne. Elle qui croyait avoir enfin accéder à la liberté après la fuite du Sha et qui n’aura d’autre choix que de se plier aux règles archaïques du pouvoir religieux ou prendre les armes. C’est ce que fait Raphaêl Djavani (né Karim). Devenu un rebelle, il finit par perdre son identité à force d’en user de multiples pour échapper aux militaires qui le recherchent. Missions, trahisons, famille menacée et exils se succèdent au cœur d’un monde clandestin où règne une violence aveugle. Iran, Kurdistan, Irak, France… sa fuite éperdue le mène à se poser maintes questions et le doute s’installe : Jusqu’où devra-t-il payer le prix du sang ? L’enfant du blé est un livre superbe car honnête, objectif et sans concession. Bien plus que le récit de son parcours initiatique et le portrait d’un pays livré au totalitarisme, c’est le témoignage émouvant d’un homme en quête d’amour pour lui et les siens, pour son pays… une souffrance que l’on sent à jamais gravée dans sa chair et qui mouille nos yeux parce que nous lui sommes redevable de ce témoignage, véritable hymne en faveur de la liberté.

Jean-Claude Di Ruocco