Capitale européenne de l’électro, Berlin est plus connue pour ses clubs et ses DJ-rois de la techno minimale comme le Berghain ou le Watergate, où l’on ondule comme un zombie sous des stroboscopes, les oreilles bombardées de basses violentes. Mais tous les soirs de la semaine, la musique des esclaves noirs d’Amérique fait vibrer différents clubs de la capitale germanique au rythme de voix chaudes et de croupes voluptueuses : le JAZZ !
Mardi soir, 22 heures. Dans un îlot de lumière plongé dans la nuit du parc Görlitzer, une voix élastique s’étire d’un octave à l’autre et fait déjà battre le cœur. La batterie s’affole et un piano s’enflamme. Soirée jam session à l’Edelweiss, un club de jazz de Berlin connu pour ses soirées chaudes.
C’est le patron du bar qui est à la batterie. Transpirant, souriant, tranquille comme un lion, il accompagne une jeune Allemande en T-shirt coulant sur l’épaule qui rejette ses cheveux en arrière en vocalisant sur Stormy Weather. Ici, l’improvisation comme les standards ont la cote. Et, contrairement au club B-Flat, dans le centre de la ville, où se presse une clientèle de quadragénaires élégants pour écouter des voix cristallines, à l’Edelweiss, les amoureux du jazz ont vingt-cinq ans et se déchaînent sur des rythmes chauds et vibrants comme la terre de la New Orleans.
Une slameuse new-yorkaise vibre sur la batterie du patron du bar
Une fille de New York se met à chalouper. Elle a un poème pour toutes les femmes: le poème de la femme africaine, en anglais. Comme un serpent, elle slame avec une sensualité et une force hypnotisante. Le public allemand – très black, très blanc, pour une fois – se tait, scié, et laisse sa bière en suspend.
Ici, les gens se parlent, s’abordent, l’amour du jazz rapproche. Parmi le public se trouvent aussi des vieux routards de la musique, cheveux longs et look très new-yorkais. Un mélange générationnel rare à Berlin. Devant la porte des toilettes, je rencontre Mamadou, alias Blow P, qui est sénégalais et a épousé une Allemande. Tous les matins, ce Musulman convaincu et détendu va à l’école apprendre la langue de Goethe, mais le soir, pour lui, c’est jam session assaisonnée de grands discours sur Dieu. Rappeur (écouter ici) installé à Berlin, il navigue entre le Sénégal et l’Allemagne. Lui aussi aime slamer sur les jam sessions berlinoises, et j’avoue, sa musique me ferait même aimer le rap, même si je ne parle pas un mot de wolof.
Le Jazz Guide Berlin vous sera très utile en cas d’envie soudaine de vibrations blues, soul, vocal ou instru. Ça change des scintillements très deutsch de l’électro minimale, et de temps à autre, ça fait du bien, non?
* Das Edelweiss, Görlitzerstraße 1-3, Haus 2, 10997 Berlin,
Tel: +49 306 10 748 58
Commentaires